Sleep – Volume One (1991)

Salut tiens cet aprem pourquoi ne pas se faire siphonner l’âme avec le premier album de Sleep? C’est un groupe tellement cool Sleep, je les aime d’amour. Mais comme un faux fan, j’avais jamais écouté le premier album, je m’étais contenté de Holy mountain et le machin terrible qui dure une heure, Dopesmoker. 

Bon le premier morceau s’appelle Mort Né (enfin, en anglais). Il commence avec un chant de moine tibétain, c’est très bien, un bon point. Puis un riff de Black Sabbath en plus lent avec des incantations qui me font penser à ce film de drogue avec Peter Fonda, The Trip, où on voit une sorte de cortège habillé avec des capuchons noirs avancer lentement sur un sentier dans un paysage de garrigue. C’est mystérieux, un peu inquiétant, ça fait nouvelle de Lovecraft. Exactement comme dans Set The Controls For The Heart Of The Sun de Pink Floyd, d’ailleurs je suis persuadé que sans Pink Floyd Sleep aurait joué une musique très différente (sans parler de Om par la suite, mais ne nous dispersons pas trop). 

Le second morceau s’appelle The Suffering, c’est un morceau de doom lugubre comme on en faisait à l’époque, avant la course à l’échalote de qui sera le groupe le plus lourd, le plus gras. Du doom qui n’hésite pas à se transformer en metal plus classique, celui qui est raisonnablement rapide et violent. Le chant ici est crié, en duo, à l’unisson si j’ose dire. C’est Al et Matt? Je sais pas trop quelle était la composition du groupe à l’époque. C’est marrant comme ça sonne kitsch par moment, surtout les solos pleins d’harmoniques artificielles ringardes, ouiinn ouinnnn cordes branlées et tout. OUH mais je ne m’étais pas trop penché sur les paroles, c’est pas la joie : “our children will die and the greed will continue / From the womb into pain and agony” Yahoo. C’est violent, nihiliste, crépusculaire, tout ce que tu veux. Ça va, j’aime bien, ça ne me pose pas de problème, il faut savoir se confronter à la noirceur du monde blabla… C’est surtout pas mal pendant les révisions à la fac. Je viens juste de finir mes études, c’est bête. C’est vraiment une sensation agréable, ce moment à 3 heures du mat, où tu commences à assimiler les cours comme un ordinateur, c’est comme si ton cerveau avalait les informations comme un canard qu’on gave, et tout ça est lubrifié par la musique violente que tu écoutes à fond au casque pour pas réveiller tes parents, tes jambes bougent toutes seules à cause du litre de café senseo que tu viens d’ingurgiter, et franchement, t’es tout tendu mais tu te sens bien, tu te sens libre, tu sens que tu controles ton corps et tous ses mécanismes complexes comme jamais. Tu souffres et ça fait du bien. Fuck yeah.

Le morceau suivant s’appelle Anguish. Un mot joli dont je ne connais pas la signification. Mais je suppose que c’est plutôt un truc négatif encore. Les paroles sont un peu lol : Viewing the Landscape, Rotting existence that your government has created. Quoi c’est encore des gauchistes comme Napalm Death? ÇA PARLE d’esclaves aussi et du Progrès. C’est pas mal, dans le genre. Par rapport à Saint Vitus et tous ces groupes, on sent qu’ils vont un peu plus loin, niveau violence, fureur, désespoir… Tout ça pour sortir 20 ans plus tard un album qui s’appelle God Is Good… En 1991, c’est pas cool. C’est la guerre tu vois, et puis l’espoir d’un monde entier acquis à la cause communiste s’est évanoui, bah. Triste. Je comprends. 

Bon je devrais dire deux mots de la musique au lieu de m’attarder sur les paroles et ces considérations extra-musicales. J’essaie de me concentrer sur la basse, j’essaie de voir si je reconnais un peu les riffs en forme de pyramide de Al Cisneros mais en fait non pas vraiment. Si, sur le cinquième morceau, Catatonic, il y a comme une pause au milieu, ça joue en son clair, tranquilement, et on croit entendre l’ancêtre du seul et unique morceau de Om. C’est émouvant, et assez intéressant en soi. J’aime bien, j’imagine en entendant ça qu’ils fumaient déjà pas mal de joints. Sleep c’est la fusion de deux tendances, d’un côté du metal certes plus subtil que la moyenne mais bon, du métal quand même, et de l’autre de la musique psychédélique aux influences orientales. Ici c’est le côté metal qui écrase le baba cool fumeur de joints quand même, c’est vrai. Du coup moi ça me concerne un peu moins comme musique j’avoue. Mais j’apprécie par exemple les passages avec des chants incantatoires, les références bibliques comme sur Nebuchadnezzar’s dream (“Majestic tree of life decays Sun is set from sky to sea Mankind meets it’s destiny”). Pourquoi ce tropisme religieux? Je sais pas si vous suivez le blog, mais j’ai déjà parlé de religion dans le billet sur Azari & III. Je disais qu’il y avait un côté mystique dans la danse de club, tous ces corps moites qui cherchent à fusionner avec la musique, c’est une sorte de recherche du nirvana quoi, la recherche du vide et du tout en même temps. Al cisneros montrera par la suite qu’il s’est intéressé à la philosophie universelle d’Aldous Huxley et sa théorie du “Divine Ground” piquée à la pensée hindouiste, cette sorte de réalité ultime qui se cache derrière les choses et que le vrai mystique cherche à atteindre, quelle que soit sa religion. Je pense que c’est à Al qu’on doit cet aspect religieux dans Sleep, que ce soit au niveau des textes que dans la musique qui ressemble beaucoup sur les albums suivants à de longs mantras. “Souls of Friction close your eyes Will Guide You To The Other Side”. “Altered Celestial Time Cosmic Wisdom Flowing And Spirit Eclipsed”. J’ai cru entendre qu’un membre originel de Sleep s’était par la suite retiré dans un monastère. Il faudrait que je me renseigne, c’était peut-être lui le vrai gourou.

Bon vous remarquerez que ma description de ce disque n’est pas hyper poussée, c’est parce que j’arrête pas de penser à cet aspect religieux chez Sleep, qui me fascine carrément. Bon quand même deux mots sur The Wall Of Yawn le septième morceau dont je viens de citer quelques lignes. Il contient un solo carrément mortellement cool, et c’est une sorte de bébé stoner, pas encore bien formé, mais une musique lourde qui tend à se débarasser de son agressivité à cause de la fumette, etc… J’aime c’est sûrement mon morceau préféré du disque. Le suivant s’appelle Prey, c’est du doom vraiment classique pour le coup, donc certes bien fait, mais pas tellement intéressant. C’est con à dire, mais les disques hyper extrêmes qui ont été enregistrés par la suite, par exemple Teeth Of Lion Rule The divine, Monarch, je sais pas quoi encore… ont rendu toutes ces tentatives early 90’s de faire une musique à la fois très lente et très violente un peu… inintéressantes. Désolé. C’est fun, mais anecdotique. Il faut accepter une certaine idée de progrès dans la musique. Ouai c’est peut-être une grosse connerie. Mais c’est comme pour la musique electronique, quand on écoute certains trucs des années 90, surtout les musiques basées sur le sampling, genre big beat, c’est nul, je suis désolé, on a fait de gros progrès depuis, alors certes il y a des choses très bien mais elles sont rares. Mh. Bon faudra que je relise ça plus tard pour voir si je suis d’accord avec moi même mais au moins reconnaissez-moi le mérite d’avoir ouvert un débat important.

Le dernier morceau s’appelle Scourge, c’est un nom un peu ridicule je sais pas ce que ça veut dire. Ça me fait penser à Courge. C’est la chanson des courgettes doom. Ce morceau est marrant,il y a des éléments mélodiques qui sont assez surprenants. C’est difficile à décrire, disons qu’on verrait bien les mecs sourire légèrement en jouant ça, pas un sourire franc du collier, mais un truc à la mona lisa, ou plutôt un sourire malveillant, moqueur, je sais pas. Le sourire du Grinch, cette horrible bestiole qui vole les cadeaux de Noël. Ce morceau pourrait très bien servir de bande son à un dessin animé avec des animaux un peu méchants, crades, grossiers. AH JE SAIS. La scène du bar de loubards dans Bob L’éponge – Le Film. En réalité c’est Motörhead la musique. Plus rapide. Mais je verrais bien ça. Sleep par moment c’est un peu du Motörhead au ralenti. Mais sans le côté sexe et gonzesses. D’ailleurs je sais pas si vous-êtes d’accord avec moi, mais plus ça va et plus Matt Pike me fait penser à Lemmy. Est-ce que High On Fire est le nouveau Motörhead? QUOI Motörhead ça existe toujours? Huhuhuh je sais. Je blague. 

Bon conclusion. Ce disque est sympa. C’est vraiment pas un chef d’oeuvre, il vaut surtout pour ceux qui veulent comprendre d’où ce groupe vient. On a tous envie de savoir comment nos groupes préférés ont commencé. En lui même il est pas si bien que ça. D’autres faisaient ça mieux qu’eux à l’époque. Enfin, pas tout à fait ça, un truc qui s’en approche. Sleep est unique et l’a toujours été, dès ce premier album. C’est juste qu’ils avaient encore pas mal de boulot pour arriver à leur formule définitive. C’est une sorte de work in progress. Bon vous avez compris quoi. Salut à plus.