The Flaming Lips – The Soft Bulletin (1999)

Super une fête chez les Flaming Lips. Il y a Kevin Shields dans l’orchestre il joue le générique d’une sitcom américaine avec des jeunes branchés new yorkais qui chahutent dans l’herbe on croirait que c’est Friends mais c’est pas friends c’est la version champêtre de Friends, c’est friends en vacances dans le New Jersey, ils sont largement plus détendus, ils sont plus heureux, ils arrêtent de raconter des mensonges et de s’embarquer dans des quiproquos surréalistes. ÇA n’existe pas en vrai une sitcom comme ça. D’ailleurs Kevin Shields ne joue pas vraiment dans l’orchestre et ce que j’entends là, ça n’existe pas, c’est une hallucination, ce disque ne joue pas de musique, il envoie des ondes magnétiques qui détraquent le cerveau, l’auditeur entend ce qu’il a envie d’entendre, c’est son paradis sonore à lui. Mon paradis à moi, donc, c’est une chanson qui ressemble à un générique de sitcom avec Kevin Shields au mellotron et Wayne Coyne au micro, et ça parle de scientifiques qui se sacrifient pour le futur de l’humanité.

Theirs is to win

It will kill them

They’re just humans

With wives and children

La seconde chanson c’est plus vraiment un générique de sitcom, c’est les Feux de l’Amour! C’est Amour Gloire et Beauté! Chanté par le mec de Yes là, comment il s’appelle, John Anderson c’est ça? C’est fou. Fou fou fou. La chanson raconte la suite des aventures des scientifiques, ils ont réussi, ils ont sauvé tout le monde et ils ont foncé vers le Soleil, où une cuillerée pèse une tonne, oui mais une cuillerée de quoi, c’est pas précisé. L’illustration sonore du Soleil, c’est cette espèce de bassé énorme de synthé, onde carrée, bien lourde, rah c’est déjà fini trop court ces morceaux.

La suite, c’est un groupe d’indie rock des années 90 qui joue un truc coolos avec des guitares électriques en son clair, une boite à rythme qui joue des charleys, une grosse caisse qui fait boum boum boum, Et cet incroyable passage avec un orchestre de cuivre et un enchainement d’accords magnifique et surréaliste puis le groupe se lance avec maracas et vibraphone et compagnie. C’est de la musique très ambitieuse quand même, c’est complexe, les arrangements sont très riches, très fournis, on se croirait revenu à l’époque où les groupes étaient hyper prétentieux, dans les années 70, avant que Johnny Rotten ne s’essuie son vomi dans ses T shirts Pink Floyd. C’est fou comme j’ai l’impression d’entendre un mix entre pink floyd, yes, genesis, et tous ces trucs que je déteste pas vraiment (surtout pink floyd) mais bon… que je ne conçois pas comme faisant partie de mon environnement familier… Et là, The Soft Bulletin, c’est comme un membre de ma famille quoi, il est accessible, je peux presque le toucher en tendant le bras, je le comprends, c’est hallucinant. Peut-être est-ce parce que les Flaming Lips ne sont pas des virtuoses? Ce sont des gens normaux, qui maitrisent raisonnablement leurs instruments, sans plus, mais ils ont des idées dans leur tête, des millions d’idées, et ça, ça me plait, ça me touche bien plus que les musiciens géniaux. 

The spiderbite Song, la quatrième. “When you got that spiderbite on your head PIOUUUUUUBOMBMOBMOBMOB/ I thought we would have to break up the band” HAHAHAHAH Les paroles sont fantastiques, aussi inventives que la musique. Elles racontent des trucs, j’aime bien. Des histoires, de petites histoires surréalistes qui parlent de scientifiques qui doivent sauver l’humanité, de voyages dans l’espace, l’histoire de ce mec qui se fait mordre par une araignée, et attendez c’est pas fini… Celle-ci parle d’amour, le mec qui se fait mordre est amoureux, et il a un accident de voiture. Et le gars qui raconte dit : si ça t’avait détruit, ça m’aurait détruit moi aussi". C’est trop mignooon. Aussi mignon que la musique. C’est un disque mignon, est positif. Très positif. Aussi positif que Smile des Beach Boys. Tiens c’est vrai, plus j’y pense, plus ce disque me fait penser à Smile. J’aime tellement Smile des Beach Boys, vous pouvez pas imaginer. La version de Brian Wilson des années 2000, avec le grand Soleil sur la pochette, c’est mon disque préféré de tous les temps. C’est du pur bonheur psychédélique concentré. J’aime ce genre de choses. Il y a un autre disque comme ça, Strawberry Jam d’Animal Collective. Tous ces disques, il faudra que j’en dise deux mots un de ces jours, ce sont mes disques préférés. 

Tiens cinquième chanson, Buggin’ ça parle d’insectes qui tournent autour de la tête du mec, peut-être le même mec que dans la chanson précédente. Et je crois qu’en fait les insectes, c’est juste une métaphore. 

Does love buzz because that’s what it does?

Well, they fly in the air as you comb your hair

And the summertime will make you itch the mosquito bites

J’adore. ÇA doit être leur version à eux des papillons dans le ventre. J’aime j’aime j’aime. Ça doit nous rappeler à tous des bons souvenirs cette chanson, quand on se rend compte qu’en fait on est amoureux, qu’on vient de tomber amoureux, moi je m’en rappelle très bien ça m’est arrivé plusieurs fois, ce moment magique, qui arrive surtout quand on est ados, on aime bien une fille et puis un jour voilà, on l’aime un peu plus que ça, et on se sent tout bizarre, mais heureux, un grand sourire niais sur le visage, et plein de rêves dans la tête, des rêves où on la prend dans ses bras, on l’embrasse sur un banc devant la Garonne, entre les cours, on va au cinéma ensemble, tout ça. C’est tellement bien, ce moment d’espoir infini. Voilà. Buggin’. Ecoutez-la cette chanson. 

La suivante parle de Lumière.

what is the light

that you have

shining all around you?

Is it chemically derived?

et plus loin :

Love is the place

that you’re drawn to.

Looking into space

it surrounds you.

Love is that face

that you’re drawn to

Je crois qu’il parle de la fille. Ou du garçon, enfin de la personne dont il est amoureux. La musique est construite autour d’un battement de coeur, enfin une imitation de battement de coeur joué à la grosse caisse avec un effet de saturation, enfin je crois, un effet bizarre comme ça. Les instruments qui se déploient autour font une fois de plus une musique euphorique, enivrante, tellement de bonheur qu’on a la tête qui tourne. Mais vraiment bien. C’est de la pop quoi, au fond rien d’extraordinaire, mais il y a un truc. Il y a de la dopamine dans cette musique, des nuages de dopamine qui s’échappent des enceintes et imprègnent l’air ambiant et rendent tout bizarre. 

Le battement de coeur continue sur la chanson suivante. C’est un instrumental qui s’appelle The Observer. Ma référence en matière de musique sans parole sur un disque de pop, c’est Let’s Go Away For Awhile, des Beach Boys. Une orchestration démente, des mélodies sublimes, et une construction narrative qui compense l’absence de texte, qui se substitue au texte. En fait, il y a un texte, mais il passe par la musique, c’est à nous de le comprendre, de le décoder en s’aidant du titre éventuellement. The Observer fonctionne un peu pareil, mais je ne vais pas vous contaminer l’esprit en vous donnant ma version, c’est à vous de vous inventer une histoire. 

Huitième chanson, Waitin’ for Superman. Grosse batterie, énorme son, basse, piano, voix, des cloches, c’est groovy, les paroles cette fois sont assez obscures, un mec demande : est-ce que ça devient lourd? Oui mais quoi? Et puis superman qui lève le Soleil dans le ciel. C’est le Soleil qui devient lourd? Haha sans blague. En général avec des paroles aussi débile, on est en droit de chercher la métaphore qui se cache derrière. Mais avec Wayne Coyne, on sait pas trop. Ce garçon est un peu excentrique, difficile de savoir s’il parle d’autre chose ou si il a juste envie de parler de Superman qui doit soulever le Soleil, mais c’est trop lourd pour lui, alors tous le monde doit y mettre du sien, et l’aider. Comme dans Spiderman, la fameuse scène du métro aérien, quand tous les passagers de la rame se mettent en travers de la route du DR OKTOPUS pour l’empêcher de faire du mal à Spiderman qui vient au péril de sa vie d’arrêter le train qui fonçait dans le vide. Les gens normaux qui essaient de rendre au super héros ce qu’il leur a donnés. C’est de la pure bienveillance qui se dégage de cette musique. C’est très chrétien, dans un sens, je sais pas si vous êtes déjà allés à une messe, moi mes parents m’y trainaient quand j’étais plus jeunes pour Pacques et ce genre de trucs, et alors parfois, tout le monde se donne la “paix du christ”, on fait la bise à ses voisins en se disant “la paix du christ”. C’est sympa. Bon autrement je supporte pas l’église, on s’y ennuie comme un rat mort, c’est sinistre, les chansons sont moches, c’est pour moi l’équivalent pour la religion de l’URSS. Je comprends pas comment les gens consentent, dans leur vie spirituelle, à cet endocrinement digne des pires régimes totalitaires! Les gens devraient être libres de penser ce qu’ils veulent, il ne devrait pas y avoir de liturgie codifiée, pas de dogme, merde. Les gens sont libres de penser ce qu’ils veulent et d’avoir leur propre dieu! Un dieu unique pour chacun!

La suite c’est “Suddenly Everything Has Changed”. Cette fois je comprends rien aux paroles. Putting all the Vegetables Away, That you bought at the grocery store today, and it goes fast, you think of the past. Suddenly, everything has changed… C’est une chanson encore une fois qui rappelle des choses dans la forme, mais qui est tellement étrange quand on l’écoute en détail. La structure même est bizarre. Plusieurs tableaux se succèdent, certains rythmés, d’autres plus contemplatifs, sans batterie… Le ciel accélère et les nuages prennent des formes géométriques… HAHA Drôle de chanson vraiment. 

La suite : The Gash. Plus que cinq chansons. A ce moment du disque on commence à être familier du son de l’album, qui reste peu ou prou le même. Mais une petite originalité sur ce morceau, c’est un gros choeur qui chante, je sais pas combien ils sont, mais beaucoup. On se croirait presque à l’Eglise tiens!! HAHA. “Still The battle that wer’re in Rages on till the end With explosions, wounds are open Sights and smells, eyes and noses But the thought that went unspoken Was understanding that you’re broken Still the last volunteer battles on”. Encore un morceau où il faut lutter contre une puissance adverse mais tout le monde s’y met, tout le monde se bat avec le sourire on dirait, parce qu’on aime sa famille, on aime ses congénères. C’est une invasion extraterrestre ou un truc comme ça, non, c’est le Mal qui attaque directement, sans s’embarasser d’apparences. C’est la grosse boule de Mal du Cinquième Élément qui fonce tout droit sur la Terre. 

OH le morceau suivant je l’adore je l’avais sur une compilation. Feelin Yourself Disintegrate. Voici les paroles in extenso : 

Love in our life is just too valuable

Oh, to feel for even a second without it

But life without death is just impossible

Oh, to realize something is ending within us

Feeling yourself disintegrate

C’est une des plus belles chansons des Flaming Lips. Il y a une batterie qui groove pas mal, une basse bien ronde, des choeurs angéliques, de l’orgue, des synthés, plein de couches de son qui sont comme un tapis de nuages au Paradis. Ecoutez-la en boucle. 

Un instrumental ensuite, Sleeping On The Roof. Encore une histoire à imaginer. Il y a un sample qui tourne en boucle, c’est un son concret que j’arrive pas à identifier, et par dessus, quelques accords de piano bar, une sorte de clarinette synthé un peu kitsch mais pas trop, et on dirait que le son devient de plus en plus fort, que des instruments rentrent sans arrêt dans la danse, de l’orgue, d’autres orgues, une basse, une guitare en stéréo, d’autres synthés et puis…. fade out… C’est court, mais intense. 

Ensuite une reprise de la chanson d’ouverture. Mais le son est plus brut, il s’agit d’un autre mixage. Pourquoi avoir foutu ça là… Certes c’est ça le principe d’une reprise, comme à la fin d’une comédie musicale. Ce disque EST une comédie musicale de toute façon, je pense que tout le monde sera d’accord avec ça. Il est d’ailleurs urgent, si ce n’est pas déjà fait, de monter The Soft Bulletin à Broadway! Je veux bien prendre ma place pour la Première. “They’re just humans with wives and children” Rah ces paroles c’est génial. Quelle bonne chanson. Ah et puis ça s’enchaine avec une autre version de Waitin’ For A Superman. Magnifique chanson elle aussi qui parle d’amour, d’entraide, de sacrifice. Comme tout le reste du disque quoi. C’est beau, ça donne envie de sourire. 

Bon je sens que j’ai explosé mon record de longueur avec ce disque alors je m’arrête là. Si quelqu’un a lu jusqu’au bout, qu’il m’envoie un message pour me le dire à cette adresse : guyjeanmiard@gmail.com. J’espère que ça vous a intéressé. Il faut écouter ce disque, il est magnifique. C’est un sublime hymne à l’amour qui a peu d’équivalents dans l’histoire de la pop. Voila cette fois j’arrête à plus bisous.