Master Musicians Of Bukkake – Twilight Of The Kali Yuga Tours (2011)

Ces mecs je les ai vus en concert et c’était bien mieux que tout les disques qu’ils avaient enregistré alors, et bien mieux que ceux qu’ils ont sorti depuis. Donc j’étais content qu’ils sortent un live. Et ce sera tout pour le contexte de toute façon si ça vous intéresse allez sur wikipedia ça sert à ça.

Ca commence avec ces énormes cornes de brume tibétaine et des cloches et des verres de cristal géants et des sortes de grelots c’est brumeux mystérieux on se croirait dans l’Himalaya au pied d’un monastère Gyüto celui avec les moines qui imitent un moteur de voiture. Il y a des percussions qui ressemblent un peu à tous ces trucs indonésiens là, un mec qui nous raconte des trucs avec une voix black métal type Attila Csihar et le synthé analogique se fait une place petit à petit on sent que la tension monte plein d’instruments exotiques dans tous les sens l’impression d’être quelque part en Asie mais on sait pas où en fait c’est plus une vision fantasmée de l’Asie une Asie de carte postale de drogués mystiques une carte postale baba cool envoyée pendant les sixties par des barbus en quête d’illumination et ils ont surtout trouvé de la beu et des champis apparemment mais c’est déjà ça je veux dire c’est quoi la différence entre un trip sérieux sous psylocibyne ou autre et une authentique illumination vous demanderez à Aldous Huxley ce qu’il en pense. C’est quand même pas tout à fait zen et bienveillant comme musique ça fait un peu peur. C’est normal. On arrive quand même dans une contrée inconnue pleine de dragons, de vieux sages qui ressemblent à Yoda, c’est évident que n’importe qui tombant nez à nez avec Yoda serait mort de trouille, déjà c’est un extra-terrestre, il est moche, il a une voix grave il est sérieux il parle en verlan et il est sévère mais juste. De quoi être traumatisé à vie. Il ne s’agit donc pas du pays des bisounours. La vérité, c’est pas toujours joyeux. C’est pas parce qu’on perce le voile et qu’on accède à un niveau supérieur de réalité qu’on se sent forcément bien hein vous le savez vous qui avez fait l’expérience du bad trip au moins une fois dans votre vie. Ce qui est frappant c’est que rares sont ceux qui regrettent a posteriori et oui l’explication est simple c’est qu’on ne cherche pas à être heureux lorsqu’on prend ce genre de drogue pour ça il y a l’alcool ou autre. C’est la connaissance que l’on cherche, ce léger décalage qui permet une vision tridimensionnelle et ça n’a rien à voir avec le concept de bonheur il se trouve que souvent c’est associé à une sensation de bien être mais c’est pas toujours le cas et on s’en fout. 

Bref. Quelque part en Asie, le lundi 30 janvier à 11h45, ça joue du synthé et des cymbales, ça fait un beau bordel comme un mur de son soyeux et brulant on entend les nuages oui on entend les nuages et on voit ce soleil de Manga qui nous adresse un grand sourire nous sommes dans un monde exotique inconnu mais en y réfléchissant bien tout ça c’est très beau et personne ne nous veut vraiment du mal c’est juste qu’ils ne vivent pas comme nous ni ce Soleil asiatique ni ces gens habillés en Sergent Kabukiman qui jouent du synthé ni ces dragons qui volent tout autour. Oh et puis à un moment on entend carrément un moine qui joue de la guitare on dirait le gars d’Expo 70 assis face à un volcan mais je vous jure qu’il s’agit d’un moine bouddhiste ou à la limite d’un cheik du désert oui parce que semble-t-il on se déplace progressivement vers l’Occident les steppes d’Asie centrale et puis les étendues dorées de la péninsule arabique peuplée de prophètes errants en devenir ou de mecs défoncés qui se sont perdus dans les dunes mais encore une fois y a-t-il vraiment une différence en tout cas qui que ce soit à la guitare il a l’air de connaitre la musique occidentale il a dû venir en voyage d’étude ou peut-être même qu’il a vécu ici quelques temps comme l’ayatollah Khomeini ou Ravi Shankar ou peut-être que non peut-être que ça me rappelle des sonorités occidentales uniquement parce que nous avons nous même pillé la musique orientale à une époque ancestrale c’est à dire principalement dans les années 60. Le son est tellement noyé il rebondit partout on se croirait dans un hall de gare sous la Marquise de la Gare Saint Jean d’ailleurs on jurerait entendre des pigeons slalomer entre les cordes de sitars et de guitare haha oui le sitar je me disais aussi il manque un truc dans ce disque voila l’instrument parfait qui permet de faire bourdonner des cordes en jouant sur les harmoniques c’est tellement beau et c’est tellement proche philosophiquement de la pratique de la méditation le son qui émane de cet instrument me rappelle un homme assis en tailleurs sous un prunier en fleur il bouge pas il est ailleurs ça sert à quoi me direz vous je sais pas méditer ou faire la révolution c’est quoi le mieux c’est quoi la vraie chose à faire je sais pas en tout cas ce sont les deux pôles autour desquels devraient graviter toute existence humaine.

C’est toujours très nuageux à aucun moment le brouillard ne semble vouloir se lever c’est comme dans un rêve ou à la montagne dans les environs du premier Minimarché quelque part dans l’Himalaya ça donne envie de se mettre à l’alpinisme cette musique vraiment. C’est très montagneux, ces énormes blocs de son noyés dans le brouillard, des blocs verticaux qui montent montent montent vers le ciel ce sont des montagnes mais des montagnes vivantes des montagnes magiques bien sûr des montagnes électriques électroniques. Il y a très peu de chant, beaucoup moins en tout cas que dans mes souvenirs de concert mais il faut dire aussi que je m’en souviens comme d’un rêve. C’est FLOU. Au moment où je vous parle un synthé fait un bruit qui ressemble à un moteur de tondeuse ou non encore plus petit qu’une tondeuse un tout petit moteur alors que les guitares construisent un mur de son aidées par d’autres instruments non identifiés et il y a d’autres bruits de synthé bizarre des petites choses électroniques ou mécaniques comme ces insectes mécaniques qu’il faut remonter pour qu’ils se mettent à avancer et puis…

C’est la fin. C’est donc un disque court et confus. C’est un collage impressionniste de bouts de concerts des Master Musicians Of Bukkake, c’est même pas représentatif de ce qu’on vit vraiment quand on est assis face à eux pendant une heure ou un peu plus. C’est surprenant, je m’attendais à retrouver ces danses indiennes de comédie musicale, ces blues du désert et ces motorik beat d’Asie du Sud Est mais non à la place on a droit à un magma psychédélique informe, brumeux, et quoi, j’ai passé un bon moment ça m’a rappelé de bons souvenirs mais ça reste assez anecdotique. Il leur reste encore à enregistrer leur Chef D’Oeuvre, le disque qui restituera l’énergie atomique de leurs concerts, de manière propre et structurée. Et si possible avec des tubes parce que je sais qu’ils en sont tout à fait capables. Bref. C’était un reportage de Guy-Jean Miard pour Danser Sur De L’Architecture. Ciao à plus.