<a href=“http://krallice.bandcamp.com/album/years-past-matter” data-mce-href=“http://krallice.bandcamp.com/album/years-past-matter”>Years Past Matter by Krallice</a>
Salut les nuls ça faisait longtemps! Alors les vacances bien ou quoi? Bon trêve de politesses passons de suite aux choses sérieuses. Ce matin on va se faire labourer les oreilles en finesse avec le nouveau disque de Krallice. Je l’ai écouté deux fois hier dans le train, et oui, oui oui, ça m’a plu, beaucoup. C’est pourtant très fatigant à écouter, ça dure une heure, il y a six morceaux, pas beaucoup de respiration entre les coups de double pédale mais ce qu’il y a de bien c’est que niveau harmonie c’est très riche et ça balaie une palette très large d’émotion, depuis “connard je vais t’arracher la langue et la donner à manger à mon chat” jusqu’à “allez mes meilleurs copains faisons nous un gros câlin avant d’aller combattre les ennemis” en passant par “pfiouu la vie c’est compliqué mais c’est beau”. Bref.
Les morceaux n’ont pas de nom et évidemment je comprends rien aux paroles, d’ailleurs je ne suis même pas sûr que ce soit de l’anglais. Il y a plusieurs chanteurs je crois, un cri plutôt grave, et un cri squelette/chat égorgé. C’est bien, un peu de variété, c’est aussi ça qui fait qu’on ne s’ennuie pas. Parce que non, vraiment, je ne m’ennuie pas en écoutant ça, ça change tout le temps, et ça donne l’impression d’être très construit. C’est pas forcément une qualité, une petite voix dans ma tête me dit par moment hé c’est un peu du rock progressif que t’écoute là… Ouai petit malaise, mais ça passe. Bon l’autre référence évidente c’est Liturgy, parce qu’ils sont du même coin et qu’ils jouent eux aussi une sorte de black metal post moderne, déraciné, intellectuel et tout, mais non en fait, rien à voir. Liturgy c’est des branleurs, Krallice ils assurent grave. Hahaha. Non oubliez ça, j’exagère. J’ai pas eu de chance, j’ai assisté au concert le plus pourri qu’ait jamais donné Liturgy. Pas de batteur, une tr 808 ou je sais pas quoi à la place, des transitions bancales, un micro fermé au mauvais moment, super pénible. Mais Krallice est assez différent finalement, beaucoup plus direct, sensuel, jouissif. C’est de la musique intelligente c’est clair, il y a des duels de guitares en staccato qui vrillent le cortex, mais ça reste fun fun fun.
C’est le deuxième morceau qui passe en ce moment, un véritable rouleau compresseur, beau et violent à la fois, comme du Neurosis en accéléré, et ça se termine par le chant des feedbacks de guitares. On souffle un peu avant le troisième morceau qui ne s’embarasse pas d’une introduction, ça balance la double pédale tranquilou, le mec qui chante comme un catcheur zombi s’arrache les cordes vocales et les guitares moulinent moulinent à fond la caisse tacatacatacatacatacatacatacatacataca. Ahlalala cette bonne vieille technique de surf music réutilisée par les métaleux et par Mogwai – pas étonnant qu’il y ait tant de ponts entre les deux. Pour le meilleur et pour le pire, hein. Le problème du staccato, c’est que ça transforme un peu la guitare en violon, on n’entend plus aucune attaque des cordes. On peut facilement sombrer dans la mollesse et finir comme Mono, le groupe le plus chiant de l’histoire. Bon ne vous inquiétez pas ce disque de Krallice n’est pas mou du tout. Il n’est pas explosif non plus, c’est un flot continu, puissant et discipliné, c’est un Amazone black metal, et on se laisse emporter et pas moyen de résister, je vous dis, hier soir je l’ai écouté deux fois, je pouvais plus m’arrêter. On trouve toujours quelque chose à quoi se raccrocher et on dérive en contemplant le paysage. C’est très agréable. Tiens, la fin du troisième morceau est très chouette. Un instrument bourdonne, les guitares s’emmêlent tout autour, une basse vient enrober tout ça, évoquant quelque chose de très vieux et très noble, un peu comme le vieux chevalier à la fin d’Indiana Jones et la Dernière Croisade. CHouette.
Ah le morceau comporte une chouette intro c’est des arpèges de guitare électrique en son clair, une petite source d’eau claire et rafraichissante qui finit par se jeter dans le fleuve puissant dont je parlais tout à l’heure. C’est reparti le batteur fait une crise d’épilepsie, les deux chanteurs s’y mettent… Je me rends compte que la combinaison de leurs deux timbres de voix ressemble beaucoup à la combinaison Steve Von Till / Scott Kelly c’est peut-être pour ça que je pense pas mal à neurosis quand j’entends cette musique. Ce morceau est plus saccadé que les précédents, il y a beaucoup de cassures, des breaks, des changements de rythme… C’est assez impressionnant, bon je ne suis pas sûr que ça soit si balaise que ça techniquement… Quoique. Les guitaristes doivent avoir une mémoire d’éléphant parce que ce qu’ils jouent est quand même super compliqué. C’est de la musique d’intello quoi. Une petite pause au milieu du morceau pour respirer, arpèges de guitare, décharges électriques, papillons qui s’envolent, un peu de Soleil, ça monte ça monte et BAM la batterie rentre, lente, lourde, martiale, avec un peu de réverbération, et l’histoire continue, chapeau bas aux guitaristes qui racontent une belle histoire avec un bout de bois et des cordes métalliques… La fin est SAUVAGE ouch ça tabasse ça fait du bien. Il y a vraiment de tout dans ce disque, du neurosis, du high on fire, du kayo dot, tout ce qui est bon.
Petite transition doomesque pas piquée des Justin Broadrick.
Et hop la dernière ligne droite kaléidoscopique. Plus qu’un quart d’heure de cette dérouillée en règle et logiquement à ce moment là vous devriez avoir complètement oublié qu’il s’agit d’un groupe de black métal. Alors peut-être que ce n’est pas le cas tout simplement, je sais pas. Faudrait demander à un expert. Mais chut. Profitons de ce délicieux moment qui devrait réveiller le guerrier qui sommeille en vous. La guerre des nerds. Ils reviennent et ils sont pas contents. Pas trop. On a volé leur TI 89 et tous les jeux qu’ils avaient amoureusement programmé dessus ; ils la retrouvent dans la cuvette des toilettes. Fuck. Pas content. Le cerveau en train de fondre, qui ressemble beaucoup à la pochette du disque, de la roche en fusion qui s’étale lentement mais sans qu’il soit possible de l’arrêter. Je me rappelle d’un mec que j’ai vu à la télé une fois quand j’étais petit, il essayait de stopper une coulée de lave qui menaçait sa maison en bois à Hawaii. Avec un tuyau d’arrosage. Et il y croyait vraiment, il passait ses journées à arroser la lave bien pâteuse qui progressait lentement. Mais non impossible. Bon je m’éloigne un peu du sujet. Ce dernier morceau n’a presque pas de paroles voire pas du tout. Seize minutes de musique progressive violente, complexe sans être technique. C’est de la musique narrative, elle raconte une histoire, une histoire de guerre et de vengeance. Il y a une intrigue romantique aussi. Pas de sexe par contre, plus tard le sexe. Le final est monstrueux ça pète dans tous les sens la batterie est à fond il y a 500 couches de guitare c’est complètement dingue.
Bref. Il y a un truc que j’ai pas assez souligné, c’est la beauté bizarre des riffs de guitare et leur manière de s’emboiter les uns dans les autres. Vraiment très beau, en plus d’être hyper sauvage. Il y a tout dans ce disque. Il me plait beaucoup et je pense qu’il est bien parti pour figurer dans mon top 10 cette année, tous genres confondus.
Bon je vous dis à plus tard les ringards. Ecoutez de la musique et si vous êtes à Bordeaux, venez voir Black Dice demain soir ça peut être rigolo.