Goatsnake – Black Age Blues (Southern Lords, 2015)


Bon maintenant on va écouter le nouvel album de Goatsnake si vous le voulez bien. Enfin je crois. Il commence bizarrement, avec un orchestre acoustique, piano violon etc, et une femme qui fait des vocalises. Hein? Heureusement très vite on entend la mer, et juste une guitare qui joue du blues en tapant du pied sur le parquet (on me fait dire qu’il s’agit de David Pajo, ex Slint et tout). On imagine un porche, une maison au bord de l’eau, c’est tout tranquille et là RIFFFF et zou c’est parti ladies and gentlement welcome to the Black Age Blues. Ca me donne des petits frissons d’entendre des nouveaux morceaux de Goatsnake. J’aime ce groupe de tout mon coeur, même si parfois le chanteur est un peu ridicule et qu’il chante faux de temps en temps. N’empêche qu’ils sont trop cools, que leur musique est aussi lourde et ronde et douillette qu’un gros mammouth à poil long. Et en plus ils parlent de Satan et de moto. Le tout dans un langage musical certes moderne mais qui reste très connecté au blues, peut-être plus que n’importe quel autre groupe heavy d’aujourd’hui. Il y a même de l’harmonica, bordel ! C’est la musique la plus fun du monde entier.

Je pars dans des digressions mais le disque continue de tourner et je sais pas du tout où on en est. Ah ouai apparemment c’est le deuxième morceau il s’appelle Elevated Man. Et oui il est déjà fini. Ensuite il y a Coffee & Whiskey, qui pour le coup ressemblerait presque à du Queens Of The Stone Age. “Coffee, Whiskey, till the cops are coming home”. C’est un morceau bondissant, avec des coups de caisse claire sur tous les temps, refrain ultra lourd, ralala. Si vous voulez mon avis, n’importe quel DJ devrait placer ça dans son set, qu’il passe du rock, de la house, de la techno, du rap ou du bal musette parce que ça, ça donne envie de sauter partout. Bon après le problème de cette musique c’est que c’est tellement énorme surgonflé comme un pick up tuné, qu’on ne peux pas s’empêcher de rigoler un peu. Beaucoup d’humour, beaucoup de dérision. Qui aime bien le heavy blues des 70’s, châtie bien le heavy blue des 70’s. C’est surgonflé, bourré de stéroïdes, il y a plus un milimètre cube d’espace disponible, un coup d’aiguille et c’est l’explosion. Alors chaque auditeur un minimum conscient de ce qui se passe ici est confronté à un choix : est-ce que j’accepte le côté moderne, le côté tuning, le côté toujours plus, le côté nageuse est-allemande, ou est ce que je considère que c’est le massacre d’une des plus belles pages de l’histoire du rock ? Moi mon choix est vite fait, la post modernité ne me dérange pas, et puis j’ose croire qu’il y a encore un peu d’authenticité dans cette bibliothèque de riffs qui dégoulinent. Après tout, ils sont américains non? C’est un bon début. Par contre, ce sont des petits rigolos, j’en suis certain. Mais bon. Des petits malins qui savent faire sonner une guitare. Ouai bon je sais pas si certains l’ignorent mais il y a du beau monde dans ce groupe. Renseignez vous, je vais pas faire tout le travail à votre place non plus.

Il y a ce refrain pas mal sur House Of The Moon, avec des choeurs qui sont assurés par les mystérieuses mais très cool Dem Preacher’s Daughters. J’aime bien parce que ça signifie que ce ne sont pas des petits merdeux en short. Ce sont des adultes responsables qui ont engagé des choristes. C’est cool. C’est cool d’être responsable et de prendre ce genre d’initiative. Trent Reznor a pris des choristes pour certains concerts récents, et c’est bien. 

Bon le problème de Goatsnake, le truc qui pourrait en destabiliser certains, c’est la voix du chanteur. Il a cette manière de chanter un peu précieuse, avec du vibrato, et assez aigu en plus, qui renvoie à Dio, à Iron Maiden,à tout ça. Même si bon, on est loin de leur précision vocale. N’empêche. C’est une tradition qui peut faire peur. C’est pas hyper rock’n’roll. C’est du lyrisme à l’européenne, c’est ce con de Jon Anderson, c’est le rock progressif, c’est les pochettes ringardes avec des dragons, des magiciens ou des chars d’assaut tatou, des histoires de chevaliers et de licornes… Ouai vous croyez que j’exagère un peu ? Demandez à ma femme ce qu’elle en pense !  

Bon vous serez prévenus. Moi ça me pose pas de problème. Je prends Goatsnake pour ce que c’est vraiment : un truc fun et un peu rigolo. C’est tout. Ah ouai et aussi je tenais à dire que je préfère 10000000 fois ça à Radio Moscow. Qu’ils sont pénibles ceux là. Leurs morceaux durent trois plombes, il y a trop de solos et on voit pas où ils veulent en venir. 

Vers la fin de la face b il y a ce morceau qui s’appelle Grandpa Jones. Il est super, c’est vraiment l’exemple parfait de croisement réussi entre le blues authentique et le doom moderne qui après tout n’est qu’un lointain parent du blues non? C’est comme si grand-papi faisait un gamin à son arrière petite fille. C’est contre nature je vous l’accorde. Mais Goatsnake est un groupe contre nature vous l’aurez compris. Un peu sataniste aussi, mais pour rigoler. Du blues sataniste de carnaval. Hum. Ouai ! Pour toutes les sorcières sudistes qui traversent des paysages désertiques en harley à la recherche de plantes hallucinogènes et autres gris gris maléfiques. Sorcières, ou sorciers d’ailleurs. Tous les adorateurs de chèvres et de moteurs bruyants. Bon. C’est fini. C’était divertissant. On entend la pluie. Bisous.