J’avais vaguement l’intention de chroniquer un album un peu mainstream histoire de générer du traffic, style Fleet Foxes ou The National ou truc ou bidule, résultat j’ai fait les Liars (moyen mainstream quand même) et maintenant j’ai plus envie et je me retrouve à faire ce truc qui ne parlera pas à ta soeur. MERDE.
Pourtant en écoutant avec une oreille vierge et néanmoins attentive, ça n’a pas grand chose à envier à tous les grands noms de la pop mondiale, Hype Williams, je veux dire, ils sont jeunes, ils sont cools, ils fument plus d’herbe que toi, un peu comme Rihanna.
Non la vérité c’est que ça commence mal, avec un dialogue de film, et puis ce morceau étrange qui serait plus à sa place dans un film de Lucio Fulci que sur un album de musique de jeunes en 2017. Je sais pas.
Le morceau suivant démarre mieux, c’est un peu groovy, il y a du shaker et puis… oups, une flute ?!?!?! Et une voix autotunée qui sort totalement du cadre. Imagine Tricky qui serait passé au crack, il pourrait pas s’empêcher de mettre des snaps et des carillons partout.
La suite est totalement Tricky sous crack avec sa boite à rythme en plastique, ses cordes de soundblaster 16 et son ambiance de barre d’immeuble sous la grisaille anglaise. Il ya quand même une petite boucle de guitare. C’est hyper court. Mais oui je n’avais pas remarqué : les morceaux sont ultra courts, ça tombe bien parce qu’ils sont pas terribles. Ou alors je suis trop vieux, trop square, trop con ?
Bon en tout cas, t’as intérêt à aimer Juxtapose de Tricky, sinon ça va être compliqué. Aussi, je te conseille de ne pas mettre ce disque si t’es de bonne humeur, au risque de te gâcher le bon moment que tu es en train de passer. Oui on ne peut pas écouter n’importe quoi n’importe quand.
Ceci dit, le 7e morceau de cet album, qui s’appelle Puredamage, est très court, mais tellement nul que je me demande si il y a vraiment un bon moment pour l’écouter. Puis ça enchaine avec un mec qui nous explique que le programme qui suit peut donner lieu à de saines discussions au sein du cercle familial. Sauf que le gars est pas net. Sa voix est tantôt normale, tantôt down pitchée, manifestement il ne contrôle pas tout et je pense qu’on ne peut pas lui faire confiance. Qu’est-ce à dire, d’ailleurs ? Que Hype Williams c’est de la musique familiale, qu’on peut en parler sereinement autour de la table en mangeant le rôti ? J’en doute. Les parents sont trop conformistes, les petits sont lobotomisés par les dessins animés de Gulli, il ne reste plus que l’ado, à la limite. Ado, donc dépressif à 80%, rebelle, preneur de tout ce qui peut choquer les vieux. Non là je parle d’un ado sain et normal, je crois que c’est une espèce en voie de disparition. Non laisse tomber, Hype Williams c’est pas un groupe familial, qui ne sera jamais chez Michel Druker ou les successeurs de Michel Druker.
Il y a ce morceau qui s’appelle “#Blackcardsmatter” il est totalement déprimant mais plutôt agréable, c’est une boucle ralentie avec des cordes, un beat délavé, et puis c’est long ça fait 4 minutes au moins, je pense qu’ils devaient en être contents de celui là.
Le suivant s’appelle Sadting, beaucoup plus court mais c’est un peu le même concept, avec plus de basses. Tout comme le suivant. Ok ça commence à être pas mal, moins barré, plus adapté à la consommation de cannabis sous la grisaille de septembre. D’ailleurs si vous avez un plan dans le Lot Et Garonne, je suis bientôt à sec et je connais personne. Envoyez un message sur la page Facebook.
Il reste encore 9 morceaux. C’est court mais c’est un peu long en même temps. Tellement gris et volontairement fadasse, tu le sens passer ce disque. Ces gens ne font pas dans la facilité, et je me demande si ils ne sont pas un peu trop arty pour être honnêtes. En tout cas ils ont appelé un de leurs morceaux “cockblocker blues”, c’est rigolo. C’est une batterie jouée sur des pads, c’est bancal, + des violons. Et en gros c’est tout.
Bon on aura compris il n’y a pas grand chose à se mettre sous la dent, c’est plus une histoire d’ambiance qu’autre chose, une ambiance grise et triste comme une rentrée marquée par une météo morose et des températures inférieures à la normale. C’est pas la franche déprime du mois de novembre ou janvier, c’est une sorte de torpeur neutre, le calme plat, chiant, motivation zéro ou presque, juste attendre que le temps passe, un joint pas super bien roulé dans la main droite, un paquet de schtroumpfs Haribo à portée, la fenêtre entrouverte pour laisser filer la fumée, les voitures qui passent l’une après l’autre, avec ce bruit caractéristique des pneus qui roulent sur l’asphalte, le bruit le plus chiant du monde, le plus inintéressant, même pas moche, juste on s’en fout, c’est une nuisance et en même temps c’est comme une absence de bruit, puisqu’il n’y a rien à en tirer, juste de l’ennui, de la torpeur.
On est pas loin du blues, quand même. Une version contemporaine du blues, faite avec un ordinateur, pas trop de chant, pas trop de mélodie non plus, mais quand même quelque chose, une impulsion fondamentale qui vient des tripes, qui pousse à produire du son pour extérioriser son mal être. A notre époque on s’en fout des accords du blues, par contre, le rythme, oui le rythme, le plus petit dénominateur commun, l’ingrédient de base, qui fait dresser l’oreille et qui fait bouger la tête… Il est là. Ensuite, il est décoré façon hype williams, hip hop r’n’b rock expérimental, mais c’est juste du bruit qui te fait remuer gentiment dans ton rocking chair. Alors finalement, c’est pas si mal.