D’abord on remarque le nom du groupe. C’est tendance d’enlever les voyelles, comme c’était à la mode de prendre un nom d’animal il n’y a pas si longtemps. C’est cool et énervant à la fois. C’était cool, ça l’est de moins en moins. Hein HTRK, MSTKRFT, SBTRKT, TNGHT… Et puis on voit ce nom débile revenir à droite à gauche, on voit la photo de presse, on en apprend un tout petit peu plus sur eux (essentiellement qu’ils sont suédois, et très mystérieux). On finit par écouter vite fait comme ça, pour se rendre compte que ouai, c’est du solide, c’est pile dans l’air du temps, mais bien fait, bon son, trucs bizaroïdes, léger parfum de substances illicites… Bref c’est cool et ça s’écoute parfaitement à la maison. C’est sorti chez Avian
Attention ça commence de manière assez bizarre n’ayez pas peur, on dirait de la musique new age avec un sample de chant tribal. Vous vous rappelez de Deep Forest? Oui pendant deux secondes j’ai pensé à Deep Forest. Pardon. Il y a donc ces accords de synthé et une femme qui chante avec de la reverbe et tout ce qu’il faut pour rendre tout ça mystérieux et inquiétant. Le bruit de fond se fait de plus en plus insistant, jusqu’à occuper une place centrale et c’est à ce moment là que le morceau démarre véritablement. Il y a du bruit donc, une grosse rythmique techno indus assez lente, très froide évidemment, mais plutôt groovy, la tentation de remuer la tête est d’ailleurs largement renforcée par un sample vocal qui tourne en boucle. La voix est passée dans un processeur lofi, et c’est juste des onomatopées genre OUH ou OH ou un truc comme ça. Résultat, c’est de la musique électronique indus cracra comme on en fait beaucoup aujourd’hui, mais avec une voix rigolote de droïde mignon. Je sais pas si c’est rigolo ou inquiétant. Des enfants avec des masques et des flingues, c’est inquiétant? Je sais pas. Le clip de Come To Daddy ne m’a jamais foutu les chocottes, personnellement.
Le second morceau est assez indescriptible. Il y a tout un tas de couches de synthé liquides et troubles, dont une basse qui tourne, 4 notes, des pseudo cordes, et par dessus une rythmique tout en syncope et en hachures. C’est stroboscopique au ralenti, et très très riche puisqu’à chaque cassure le son de la boite à rythme évolue de manière radicale, ça va de la bouillie sous pitchée et saturée à des petits pouets pouets plus cleans… Je suis moyennement emballé ; c’est difficile à expliquer, mais chez moi, dans ma tête, ça ne prend pas. Ca me laisse froid. C’est la combinaison des textures qui n’est pas spécialement harmonieuse, la mélodie un peu fadasse, la construction à base de hoquets qui ne permet pas de plonger dedans pour se dissoudre dans la musique… C’est comme si en club, un con rallumait la lumière pendant une seconde toutes les deux ou trois secondes. C’est juste chiant. Bref.
Ah enfin un autre morceau. Je vous ai pas dit, mais ces suédois mystérieux n’utilisent jamais de voyelles. On se retrouve avec des titres comme RSRRCTN ou LTTLWLF. Justement le troisième morceau c’est RSRRCTN et je suppose que ça veut dire RESURRECTION? Je sais pas si ils parlent de Jésus ou je sais pas moi par exemple un caca qui est revenu à la vie dans la cuvette des toilettes. Ou un arbre mort qui se remettrait à faire des feuilles. En tout cas on a là un vrai morceau de techno un peu bizarre mais qui fait danser. C’est toujours brumeux, sombre, froid, cette fois avec une rythmique syncopée mais pas trop, comme un cheval à qui il manquerait une patte, le pauvre. Je pense plus à une machine en fait. Derrière ce gros beat de manufacture brésilienne, il se passe des choses hallucinantes, des micro séquences de photocopieuses, des synthés analogiques qui ondulent, c’est beau et groovy, juste ce que la moitié de la planète demande, l’autre moitié étant trop occupée à regarder Breaking Bad ou une autre série à la mode.
On accélère le tempo sur le morceau suivant, et ça c’est bien. Rythmique ultra minimaliste, arcs électriques parasites, chants de fantômes, ça fait très série de SF des années 60, mais en techno. Un mix entre la quatrième dimension et la série Star Trek. Autrement dit, le premier film Star Trek de 1979. Ils pourraient faire un ciné concert. Ils en seraient capables. Le morceau évolue, lentement mais wow il y a une sorte de méga laser hyper surprenant qui fait piouwowowow ça réveille et c’est joli. De plus en plus de bruits parasites, de sons acid d’outre tombe, Je trouve ça bien. La construction des tracks reste assez énigmatique, les évolutions ont l’air de se faire de manière aléatoire, ou alors je comprends pas mais bon faut pas déconner, je vais pas écouter 10 fois un truc de techno pour comprendre la structure. Tout ce que je demande c’est que ça me fasse danser, et accessoirement réfléchir/me faire pleurer/m’émerveiller en même temps, mais c’est vraiment secondaire. Je ne suis pas du tout contre écouter de la techno chez soi mais même dans un cadre domestique j’ai pas envie de me battre pour comprendre : ça vient ou ça vient pas.
Le morceau suivant est un peu dans la même veine que le précédent. La rythmique est toujours aussi minimaliste. Un kick très grave, une attaque pas très marquée… Les autres éléments ne sont pas vraiment identifiables, il y a bien une sorte de charley, mais pour le reste, ce sont des choses qui agrémentent le rythme, sombre, brumeux et industriel. La ligne de basse est discrète, hyper étouffée, mais elle est là et parfois le mec tourne le potard de filtre et elle reprend la place qui lui revient c’est à dire sur le trône, à côté du kick. Le kick c’est le roi, la basse c’est la reine. Chouette travail avec les synthés. De manière générale je trouve que ce disque marie très bien les sources digitales et les sources analogiques, tout semble venir de la même manufacture clandestine dégueu hantée par les fantômes des petits enfants qui y travaillaient. Ils fabriquaient sûrement des tuyaux.
L’avant dernier morceau. Euh… Tempo plus lent, stroboscopie au ralenti, ce morceau serait carrément plus classique que les autres si le rythme était un peu plus normal, je veux dire, moins syncopé. C’est de la techno pour robots. Avec un travail sur les filtres qui devient vite relou, ça pique les oreilles et c’est moche et j’ai envie de dire à ces mecs c’est bon quoi, on joue plus comme ça avec les potards de filtre depuis 2002 au moins. Par contre je ne sais pas trop ce qui se passe exactement mais la basse devient énorme de temps en temps. Je sais pas si il s’agit d’un filtre passe bas qui est tourné ou si c’est une nouvelle machine qui joue, en tout cas ça vrombit et c’est trop bien. PLUS DE BASSE TOUJOURS PLUS DE BASSE merci.
Et nous voilà arrivés au dernier morceau. Ça va ça n’aura pas été trop pénible. C’était même assez chouette. Le track s’appelle LLDTMPS. C’est plus dur à décrypter comme nom. Plutôt rapide le morceau, et carrément hypnotique. Ici le truc cool c’est ce drôle de synthé fantôme, 4 notes en arpèges, doublé d’un deuxième synthé, même rythme, qui rentre petit à petit, tout déglingué, il joue même pas une note, c’est comme un piano désaccordé, mais en version synthé, on dirait même qu’il va caller, tellement il a l’air fatigué, ouh c’est dur. Il y a des voix samplées, et de la ride. La séquence de basse change, aigu/grave/aigu, ça rebondit, c’est groovy, on sent que ça monte, le courant devient plus fort, puis il y a un reflux, ce qui permet de mieux entendre cette voix, avec plein de delay filtré… Non mais c’est vraiment de la musique de drogué ce truc. C’est mental. Ça pour le coup, ça fait vraiment réfléchir. C’est le plus long morceau il fait presque 12 minutes, ça permet d’entrainer l’auditeur un peu plus loin, ça marche très bien. Le temps s’arrête pendant peut-être une ou deux minutes. Je me demande comment réagiraient les gens si on leur passait la même boucle pendant une heure : est-ce qu’ils partiraient tous commander des vodka et fumer des clopes? Ou est-ce qu’ils continueraient à danser? Est-ce que quelqu’un a déjà tenté l’expérience?
Bon sur ces réflexions, je vous dis salut à plus.